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PIERRE GIRARD
te, en particulier en ce qui concerne la question de
Xingenium
qui sera
au cceur de notre étude. Comme nous aurons l’occasion de le dévelop-
per, le
Trattato dell’ingegno dell’huomo
(1576) d ’Antonio Persio,
VExa­
men de ingenios para las ciencias
(1575) de Juan Huarte sont également
des sources communes5, de mème que le
Libro del cortegiano
de Bal­
dassarre Castiglione, que Graciàn cite explicitement dans l’adresse au
lecteur du
Héroeb
et qui inspire une bonne partie des textes pédago-
giques de Vico7.
Il
est par ailleurs possible de décliner cette proximité entre les deux
auteurs de manière multiple: Graciàn meurt en 1658, soit dix ans avant
la naissance de Vico, de sorte que les deux auteurs semblent s’inscrire
dans une continuité. Cette dernière concerne aussi bien les concepts
propres à chacune des pensées: il est ainsi possible de rapprocher les
«conceptuosas imàgenes» de Graciàn des «Universali fantastici» de Vi­
co. Il en va de mème pour la question de l’héroi'sme ou celle de
Xinge­
nium
qui nous concerne ici plus particulièrement. Cette continuité ap­
p a ra i également dans une attitude similaire face au cartésianisme, et en
particulier face à la tradition de Port-Royal. On peut enfin la constater
dans la difficulté que la critique semble avoir pour donner un statut rhé-
torique précis aussi bien aux textes de Graciàn qu’à ceux de Vico. Le
mélange des niveaux rhétoriques propres au
Criticón
ou à
XAgudeza8
est
analogue à celui que l’on peut constater dans les différentes versions de
la
Scienza nuova
de Vico, texte qui mélange les perspectives philoso-
§ 37, p. 285). Dans son étude sur la pensée rhétorique de Vico,
M. MOONEY,
Vico e la tradi­
zione della retorica
, tr. it. Bologna, 1991, p. 206, affirme que derrière Peregrini, c’est en réali-
té avec Graciàn que discute Vico.
5 Sur une telle continuité dans l’histoire des idées, voir l’article de S. G ensini, Ingenium
e linguaggio. Note sul contesto storico-teorico di un nesso vichiano,
in
Vico und die Zeichen. Vi­
coe i segni,
a cura di J. Trabant, Tùbingen, 1995, pp. 237-256. Voir également les belles études
de S. GENSINI, Ingenium
/ingegno fra Huarte, Persio e Vico: le basi naturali dell’inventività
umana
, et d ’E. H id algo -Sern a,
Funzioni dell’ingegno nell’Umanesimo e nel Barocco spagno­
li,
in
Ingenium propria hominis natura,
a cura di S. Gensini e A. Martone, Napoli, 2002, pp.
29-86. On peut enfin se référer à une étude récente de S. Leoni,
Les mots sous les mots: l'
in­
gegno
chez Vico,
in
Création et mémoire dans la culture italienne (XVe-XVIIIe siècles),
textes
réunis par S. Leoni et A. Perifano, «Annales littéraires de l’Université de Franche-Comté»,
2001,718, pp. 149-170.
6 Pour Graciàn, nous faisons à chaque fois référence à l’édition
Obras completas
[notée
OC],
edición de Luis Sànchez Laflla, Madrid, 2001, p. 4.
7 Voir en particulier G . V ico,
De nostri temporis studiorum ratione
(notée
De rat.),
VII.
8 Sur cette question centrale du style et de l’écriture de Graciàn, voir les remarques de B.
P
elegr
ÌN,
Fisica y metafisica del estilo de Baltasar Graciàn,
in
Baltasar Graciàn. EI discurso de
la vida. Una nueva visión y lectura de su obra,
coordinador J. M. Ayala, Barcelona, 1993,
Documentos A, n° 5, pp. 46-67.
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